« La Guerre » 1968, par Mai Thu : un cri pour l’humanité.

12 décembre 2019 Non Par Jean-François Hubert

Mai Thu est surtout connu pour ses représentations d’un monde heureux, doux et fantasmé, rempli de jolies femmes en ao dai et de charmants enfants, même si le message subliminal n’est jamais loin.

 Ici le sujet est tout autre et sa date d’exécution – 1968 – fondamentale.

L’année 1968 marque en effet un tournant dans la guerre dite « américaine » au Vietnam : l’offensive du Têt fut une défaite militaire – mais une grande victoire médiatique – pour le Nord et les Vietcong. 

L’intrusion de ceux-ci au sein de l’ambassade américaine à Saigon, la destruction de Hué, ville-martyre, les combats de Khe Sanh, connurent une telle couverture médiatique internationale qu’un revirement non seulement de l’opinion internationale mais aussi de l’opinion américaine sur le sens de cette guerre s’opéra : dorénavant l’opinion majoritaire est que rien ne peut justifier de telles destructions, la guerre doit prendre fin.

En ce sens Mai Thu s’inscrit dans ce courant général d’opinion et il peint une œuvre d’une puissance extrême :

Mai Thu - La Guerre
Mai Thu – La Guerre

La femme au premier plan avec ses cheveux défaits, son regard exorbité est une femme du Sud comme en témoigne son foulard. 

Elle et l’enfant qu’elle tient dans la main gauche, nu et famélique, témoignent de l’horreur de la guerre. La douceur du regard de l’enfant -seule note d’espoir dans ce tableau – est très vite subjuguée par le rougeoiement du bombardement qui, en une auréole de mort, dévaste tout. 

Le ciel, le plus souvent neutre dans l’oeuvre de Mai Thu, est ici le lieu d’une tempête.

Tout est chaos et drame mais la main de la mère serrant la cuisse de son enfant nous préserve une parcelle d’humanité.

Jean-François Hubert